Je poursuis actuellement mes investigations sur les modes de permaculture (= culture durable) urbaine. Dans ce contexte, je ne pouvais pas ne pas parler du Bois Raméal Fragmenté (BRF), une technique qui s'inspire directement de ce qui se passe en forêt. Le principe peut paraître simple mais il est en fait incroyablement complexe tant il fait intervenir de nombreuses relations bio-physico-chimiques.

Le BRF est un mélange non composté (c'est important!) de résidus de broyage de petits rameaux de bois (<7 cm de diamètre). Toutes les essences ne peuvent pas être utilisées, seules les essences à bois dur (châtaignier, robinier, hêtre, frêne, etc) à l'exception du noyer peuvent rentrer dans sa composition. Les résineux (à l'exception du mélèze) sont proscrits, notamment les thuyas, toxiques pour les micro-organismes du sol. Il est très important de n'utiliser que les rameaux et non l'écorce ou les autres parties de l'arbre. En effet, les rameaux de bois sont les éléments les plus riches de l'arbre et concentrent les minéraux, les protéines, les acides aminés et les phytohormones.

Le BRF s'épand sous la forme d'une litière d'une dizaine de centimètre, qui peut être incorporée aux 5/10 premiers centimètres du sol, mais pas plus. Il va servir à réinstaller l'activité biologique en étant le lieu d'une très complexe chaîne trophique (= chaîne alimentaire). Pour comprendre comment cela est possible, il faut se pencher sur les constituants du bois des branches.

Une des particularités du BRF est de contenir de la lignine, une source d'énergie potentiellement importante mais difficile d'accès pour les micro-organismes. Peu d'organismes peuvent la digérer, parmi lesquels les champignons du groupe des basidiomycètes. Lors de l'épandage du BRF, ces champignons vont se développer en dépolymérisant la lignine. Ils vont en outre produire des glomalines, des glycoprotéines qui agissent sur la structure du sol en stabilisant les agrégats de particules fines. La dépolymérisation de la lignine va également produire des polyphénols antioxydants qui vont favoriser la réorganisation (minéralisation) de l'azote initialement contenu dans les branches dans le sol. L'azote minéral sera ensuite disponible pour les végétaux.

Le problème est que, dans un premier temps, les champignons ont besoin d'une grande quantité d'azote pour leur activité propre. Et ils vont puiser cet azote directement dans le sol. Ceci peut se traduire par une carence temporaire en azote après l'épandage du BRF. On peut pallier aux conséquences de cette situation transitoire par le semis d'un engrais vert de légumineuses (dont j'ai déjà présenté les bénéfices ici). En revanche, l'apport d'azote sous la forme de fumure est proscrit car ceci accélérerait le processus et se traduirait, in fine, par des problèmes de minéralisation de l'azote issu du bois (je n'ai pas compris tous les processus, mais c'est grosso modo ce que j'ai retenu).

L'idéal est donc d’épandre le BRF en automne, lorsque les cultures ont besoin de moins d'azote (car au repos), en le faisant précéder ou suivre d'un semis de légumineuses, puis, éventuellement, d'une incorporation de compost l'année suivante.

La question reste néanmoins entière quant à la possibilité d'utiliser ce procédé dans des systèmes "hors-sols" comme des bacs ou des pots. Une chose est sûre néanmoins: si l'on veut tester ce système dans des bacs, il semble nécessaire d'inoculer le BRF avec des basidiomycètes en ajoutant de la litière forestière.

Seconde question: où trouver du BRF? Quand on habite en ville, on a rarement une déchiqueteuse chez soi. J'avoue que mon investigation n'a pas porté sur ce point en particulier mais j'imagine qu'en contactant les services d'élagage des villes et/ou les déchetteries, on devrait avoir une réponse à cette question.

Pour finir deux vidéos trouvées sur Youtube et qui expliquent le principe du BRF: